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Se servir de Hong Kong pour casser les BRICS ?

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Karel Vereycken


Les sponsors privés de la National Endowment for Democracy (NED) comptent sur cette fondation américaine pour promouvoir la démocratie à Hong Kong.

(Solidarité&Progrès)—Des milliers d’étudiants occupant le centre de Hongkong et exigeant le départ du chef de l’exécutif Leung Chun-Ying et des élections démocratiques. Voila l’image que nous transmettent les grands médias occidentaux.

Lorsque les manifestants ont tenté de prendre d’assaut le siège du gouvernement, la police les a repoussé avec des gaz au poivre et lacrymogènes. Immédiatement médiatisée, la répression policière a suscité un sentiment de sympathie pour le mouvement dont les rangs ont continué à grandir.

Un pays, deux systèmes

Hong Kong, une ancienne colonie britannique peuplée de 7 millions d’habitants, a été officiellement rétrocédée à la Chine en 1997 et dispose d’une autonomie considérable sous le statut d’« un pays, deux systèmes ». Ce modèle, qu’elle partage avec Macao, accorde aux résidents de l’île semi-autonome certains droits d’expression politique et de liberté de presse, des droits plus élevées que le reste du pays.

En août, le Congrès national du peuple (CNP), le plus haut organe de pouvoir d’État en Chine, a rendu public une réforme encadrant l’élection de 2017 qui doit élire le prochain dirigeant de l’exécutif. On y exige notamment que tous les candidats doivent obtenir l’approbation préalable d’un collège électoral composé de 1200 personnes.

Pour la presse occidentale, c’est Beijing qui bafoue ses engagements antérieurs en faveur d’élections libres et viole l’accord de rétrocession de la colonie britannique signé en 1984 entre Londres et la Chine. Il est vrai que le CNP a promis d’organiser des élections universelles pour la désignation du chef de l’exécutif en 2017 et un suffrage universel pour l’élection des membres du Conseil législatif de Hong Kong en 2020.

Seulement, la plupart des médias font semblant d’ignorer le fait que la Loi fondamentale qui sert de constitution de Hong Kong depuis 1997 stipule que

« le but ultime, c’est la sélection d’un chef de l’exécutif par le suffrage universel suite à sa désignation par un comité largement représentatif et en accord avec les procédures démocratiques. »

En clair, il est tout simplement malhonnête d’accuser la Chine de vouloir renier ses engagements. Notons d’abord que jusqu’ici, jamais un chef de l’exécutif ne fut élu par suffrage universel direct, mais élu par les 1200 membres du collège électoral. Et l’accord sino-britannique organisant la rétrocession de Hong Kong ne fait par ailleurs aucune mention de suffrage universel.

Même si les manifestants n’aiment pas ces règles, il n’en demeure pas moins qu’avec les réformes promues par Beijing, ce sera la première fois dans l’histoire de Hong Kong que la population pourra élire quelqu’un par suffrage universel ! A cela s’ajoute également le fait qu’en Chine, personne d’autre ne bénéficie du type de scrutin que réclament les manifestants. Beijing, qui préfère une « démocratie » souveraine à une « révolution de couleur » pourrait calmer le jeu en garantissant que le collège électoral autorise une palette très large de candidatures.

Londres, Washington et les révolutions de couleur

La Chine, un des piliers du groupe des BRICS, sait très bien qu’une législation trop perméable permettrait aux Occidentaux de mettre en selle des dirigeants qui organiseraient, à terme, la sécession de Hong Kong.

Martin Lee et Anson Chan, deux dirigeants du Parti démocrate de Hong Kong, se sont rendus récemment à Washington et Londres pour solliciter l’aide des deux pays occidentaux qui aident et promeuvent, sans s’en cacher, le mouvement pro-démocratie.

En Chine et à Hong Kong on retrouve une fois de plus la National Endowment for Democracy (NED), une fondation américaine financée par le contribuable américain qui a joué un rôle de premier plan dans le financement des « révolutions de couleur » en Europe de l’est, en Amérique du Sud et ailleurs. La NED a contribué à hauteur d’un demi million de dollars à des programmes destinés à

« développer la capacité des citoyens – en particulier des étudiants d’universités – de participer plus efficacement dans le débat public sur les réformes politiques (…) leur permettant notamment d’explorer les réformes possibles conduisant au suffrage universel. »

Bref, des programmes en apparence idéals pour rallier du soutien populaire pour le type de manifestations qu’on voit aujourd’hui à Hong Kong.

Joshua Wong, le dirigeant étudiant hongkongais de 17 ans arrêté par la police lorsqu’il menait les manifestants à l’assaut des bâtiments officiels, d’après la presse chinoise, a reçu des donations des États-Unis et a rencontré fréquemment le personnel du Consulat américain depuis trois ans.

Jimmy Lai, le magnat de presse anti-Beijing de Taiwan et Hongkong et un ami du néoconservateur Paul Wolfowitz, a également reçu des financements de la part du Parti républicain américain en vue d’aider le mouvement Occupy Central with Peace and Love.

John Kerry

Lors de sa conférence de presse à Washington le 1er octobre, le Secrétaire d’État américain John Kerry n’a pas hésité à déclarer que « Comme la Chine le sait, nous soutenons le suffrage universel à Hong Kong en accord avec la Loi fondamentale ».

Son homologue chinois Wang Yi, présent lors de la conférence de presse a immédiatement répliqué que la Chine ne pouvait tolérer des « actes illégaux » [la prise d’assaut et l’occupation de bâtiments officiels] :

« Le gouvernement chinois a fermement et clairement fait connaître sa position. Les affaires de Hong Kong sont des affaires intérieures chinoises (…) Tous les pays devraient respecter la souveraineté de la Chine et il s’agit d’un principe de base gouvernant les relations internationales. (…) Je crois qu’aucun pays, aucune société, ne permettrait des actes illégaux qui violent l’ordre public. C’est le cas aux États-Unis et c’est pareil à Hong Kong. »

Pour le quotidien Global Times, l’organe du Parti communiste chinois, il faut tout faire pour empêcher qu’une « Révolution de couleur » ne vienne plonger la Chine dans le chaos et le désordre. « Hong Kong n’est pas l’Ukraine », affirme le journal.

Bien sûr, bon nombre de manifestants sont des jeunes de bonne foi et la société hongkongaise est très divisée. Si, lors d’un référendum non officiel Occupy Central a pu récolter 800 000 voix en faveur d’élections au suffrage universel, l’Alliance pour la paix et la démocratie, un mouvement pro-Beijing, a réuni presque 1,5 million de signatures de résidents d’Hong Kong opposé au mouvement Occupy Central qui voient leur sort économique irrémédiablement lié à Beijing.