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Sommet « 16+1 » à Budapest : Le centre de gravité économique passe de l’Ouest à l’Est

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S&P—Le sixième sommet réunissant la Chine et seize pays d’Europe centrale et orientale (PECO) s’est tenu à Budapest les 27 et 28 novembre. La participation des pays de la région à la construction des Nouvelles Routes de la soie, autrement dit l’initiative chinoise de la ceinture et la route (BRI), était au cœur des discussions.

Selon le communiqué final du sommet, « les participants affirment leur volonté de continuer à coopérer dans le cadre de l’initiative chinoise à travers le dialogue et le partage des bénéfices en recourant à la coopération 16+1, [afin d’]essayer de développer davantage les synergies entre la BRI et des initiatives importantes telles que le plan d’investissement pour l’Europe, ainsi et que les plans de développement respectifs des pays concernés ».

De nombreux échanges bilatéraux ont eu lieu au cours des deux journées entre le Premier ministre chinois Li Keqiang et les dirigeants de Hongrie, Slovaquie, Slovénie, Macédoine et Bosnie-Herzégovine, avec la volonté de part et d’autre de renforcer la coopération bilatérale et le souhait exprimé d’accueillir davantage d’investissements chinois. Le Global Times rapporte que Li Keqiang et le Premier ministre hongrois Viktor Orban ont signé plus de dix accords de coopération, dans les domaines de l’agriculture, du e-commerce, de la finance, des télécommunications, du tourisme et de l’éducation, entre autres.

De manière symbolique, la Serbie a inauguré mardi le lancement des travaux de la ligne ferroviaire Belgrade-Budapest, à la clôture du sommet. Ce projet de train à grande vitesse, construit et en grande partie financé par la Chine, pour un coût total de 3,8 milliards de dollars, a pour objectif de faire de cette voie la route principale par laquelle les produits chinois transiteront vers l’Europe depuis le port du Pirée. La branche hongroise de la ligne a jusqu’à présent été bloquée par l’UE, qui fait tout son possible pour empêcher ou freiner certains investissements chinois en Europe.

Ça grince des dents en Occident

Les élites du Titanic transatlantique regardent évidemment d’un mauvais œil le fait que la Chine vienne aux portes de l’Europe apporter aux pays de la région le développement que l’UE est incapable de leur offrir. À la veille du sommet de Budapest, le Financial Times, porte-voix des intérêts la City de Londres, a publié un article intitulé « Bruxelles ébranlée par l’arrivée de la Chine en l’Europe de l’Est ». Visiblement en manque d’arguments, le journal reconnaît dans un sarcasme typiquement britannique que les pays de la région s’ouvrent vers l’Est, voyant dans ces projets le ciment d’une « amitié fiable », et finit par admettre qu’« il est clair que l’étoile de Beijing monte en puissance dans les pays d’Europe centrale et orientale ». Puis il cite Viktor Orban : « Le centre de gravité de l’économie mondiale se déplace d’ouest en est ; bien qu’il y ait encore un certain déni de cette réalité dans le monde occidental, ce déni ne semble pas raisonnable. Nous voyons le centre de gravité de l’économie mondiale passer de la région de l’Atlantique à la région du Pacifique. Ce n’est pas mon opinion, c’est un fait ».

En France, ce désarroi des élites transparaît clairement dans la chronique de Sylvie Kauffman, parue le 28 novembre dans le journal Le Monde, et intitulée « L’Europe centrale et orientale, tête de pont de la Chine sur le Vieux Continent ». D’après Kauffman, le président chinois Xi Jinping a bien compris qu’ « il y a deux Europe : la vieille et la nouvelle. Dans cette vision, la première apparaît rétive, bourrée de préjugés, campée sur une grandeur passée qu’elle prétend protéger ; la seconde est en devenir, plus avide de progrès, moins regardante et en demande, aussi, de nouveaux partenaires. Et la nouvelle Chine aime la nouvelle Europe ». Quand le cynisme couplé au désespoir donne une certaine lucidité…

Mais la bien-pensance néo-conservatrice ne perd pas de sa vigilance : « La face visible de la ‘nouvelle route de la soie’, ce sont des routes bien sûr, mais aussi des rails, des ports, des centrales énergétiques, bref, des infrastructures, » poursuit la journaliste. « Et des crédits. Tentant, pour les pays que traverse cette ‘route’ de la Chine à l’Europe, de l’Asie centrale à l’Europe orientale, du Kirghizistan à la Biélorussie ! » Toutefois, les belles intentions de la Chine masqueraient un « objectif géopolitique », la véritable « face cachée » de la BRI : la volonté de « recréer le bloc de l’Est » ! Si Madame Kauffman serait un excellent guide dans un musée sur la Guerre froide, elle l’est beaucoup moins pour nous éclairer sur le nouveau paradigme mondial en train de voir le jour.

Zhang Ming, l’ambassadeur de la Chine auprès de l’UE, a justement publié le 27 novembre un article répondant à ces idées fausses répandues en Occident sur la Chine : « Certains qualifient la tactique de la Chine vis-à-vis de l’UE de ‘diviser pour mieux régner’ », écrit-il. Mais ces inquiétudes n’ont aucun fondement, estime-t-il, car « la Chine a toujours été partisane de l’intégration européenne... Diviser l’UE n’est pas dans l’intérêt de la Chine. Au contraire, la coopération 16+1 insuffle une nouvelle vigueur à la coopération Chine-UE ».

La puissance des idées

Lors de la conférence internationale de l’Institut Schiller, qui s’est tenue les 25 et 26 novembre à Bad Soden en Allemagne, sur le thème « Réaliser le rêve de l’humanité », la présidente de l’Institut, Helga Zepp-LaRouche a déclaré : « C’est le manque manifeste et absolu de développement dans le vieil ordre mondial qui permet à la Chine et à l’esprit de la Nouvelle Route de la Soie de prendre le dessus, et qui fait que de nombreuses nations dans le monde sont désormais déterminées à bénéficier d’un développement apportant une vie meilleure à leurs populations. (…) Je pense que la Nouvelle Route de la soie est l’exemple typique d’une idée dont le temps était venu ; et une fois qu’une telle idée devient une réalité matérielle, elle constitue une véritable force physique dans l’univers ».