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Espagne : un pont vers l’Afrique

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Tristement célèbre aujourd’hui pour être l’épicentre de la désintégration du système bancaire européen et pour avoir le taux de chômage le plus élevé d’Europe – 24,4 % officiels pour l’ensemble du pays, dont plus de 50 % chez les jeunes – l’Espagne sera demain, dans une économie mondiale en redémarrage, l’un des principaux ponts géographiques et économiques de l’Europe vers l’Afrique. Elle jouera un rôle central dans le lancement de projets scientifiques, d’infrastructures, d’ingénierie et de biens d’équipement en Afrique du Nord, processus par lequel elle atteindra un plein emploi productif, grâce à des emplois hautement qualifiés.

Voici les projets que l’Espagne et son voisin ibérique, le Portugal, devront lancer pour créer plus de dix millions d’emplois productifs, et de millions d’emplois supplémentaires dans tout le bassin méditerranéen :

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Chemins de fer : l’Espagne devra construire des corridors industriels de haute technologie le long des 15.000 km de nouvelles lignes ferroviaires à grande vitesse (dont des lignes à lévitation magnétique) qui traverseront de part et d’autre l’Espagne et le Portugal, rejoignant le Pont terrestre mondial – le réseau de lignes à grande vitesse traversant le monde d’Est en Ouest — dans le Sud de la France.

Tunnel du détroit de Gibraltar : un tunnel de 40 km sous le détroit de Gibraltar, reliant l’Espagne au Maroc, permettra de lier les corridors ferroviaires européens aux futurs réseaux ferroviaires Nord-africains. Ce sera un projet dont l’échelle et l’importance rejoindront celles du tunnel sous le détroit de Béring et du projet du bouchon de Darién, car comme eux, il liera un continent entier au Pont terrestre mondial.

Eau : l’Espagne sortira des tiroirs des projets viables de transfert d’eau, tel celui du puissant fleuve Èbre qui traverse l’Espagne du Nord-ouest au Sud-est avant de se jeter dans la Méditerranée. Ce projet permettrait un transfert annuel d’environ un kilomètre cube d’eau vers la côte méditerranéenne semi-aride ; 1,5 km³ d’eau potable seront aussi produits chaque année grâce à des usines de dessalement alimentées par de l’énergie nucléaire.

Énergie nucléaire : en plus des centrales nucléaires requises pour le dessalement, l’Espagne bâtira des centrales nucléaires modernes pour produire environ trois fois plus d’énergie que les 7500 MWe annuels que le pays tire actuellement de ses huit centrales vieillissantes. Cela lui permettra de s’affranchir du recours économiquement destructeur (et scientifiquement incompétent) aux énergies éoliennes et solaires, qui lui a été imposé via l’influence des mouvements écolo-malthusiens manipulés depuis Londres et tout particulièrement le World Wildlife Fund (WWF).

Astrophysique : les îles Canaries constituent un site idéal pour établir un nouveau centre spatial euro-africain, doté de l’équipement nécessaire au lancement de satellites ainsi que d’une ville scientifique à proximité. Ceci sera coordonné avec les travaux importants réalisés en Grèce, en Italie et d’autres nations, dans le domaine de la détection des signes avant-coureurs sismiques, ainsi que d’autres domaines, qui s’intégreront dans le programme de Défense Stratégique de la Terre (SDE), pour servir les objectifs communs de l’humanité.

Ce ne sera pas la première fois de son histoire que l’Espagne jouera un rôle de catalyseur au carrefour de civilisations. Sous l’égide personnelle d’Alphonse X «  le sage  », roi de Castille et León de 1252 à 1284, Tolède, la capitale castillane fut construite dans le centre scientifique le plus important d’Europe à l’époque, et fut aussi le lieu de transmission des classiques grecs et des plus belles œuvres de la Renaissance arabe en Europe continentale. Alphonse était particulièrement connu pour son travail en astronomie et pour son École de traduction à Tolède, rassemblant alors les érudits les plus en vue des trois grandes religions monothéistes du monde – l’Islam, le Christianisme et le Judaïsme – pour rendre accessibles les textes scientifiques et religieux les plus avancés de chaque culture.
Il est temps d’ouvrir une nouvelle « ère Alphonsine ».

Sous-peuplée...

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Puisque le développement des pouvoirs productifs du travail constitue la seule source de vraie valeur dans une économie, la dynamique démographique de la main d’œuvre espagnole est le point de départ adéquat de notre diagnostique et des solutions que nous proposons. La population espagnole est d’environ 46,2 millions de personnes, avec une densité démographique moyenne approchant les 91 habitants par kilomètre carré. Mais cette population est répartie de façon très inégale sur le territoire national, avec une forte concentration le long de la côte Méditerranée et dans la capitale, Madrid, alors que toute la zone centrale – près de la moitié du territoire – a une densité de population de moins de 25 habitants par km². Ceci montre une fois de plus que les moyennes mathématiques ne présentent pas forcément une mesure adéquate du monde réel de l’économie physique.

Comme on peut le voir sur la carte 1, l’Espagne est en décalage avec le reste de l’Europe occidentale sur ce plan, à l’exception de pays à population éparse comme la Finlande ou la Suède.

Au cours du XXe siècle, l’ensemble de la population espagnole a triplé, mais 11 de ses 50 provinces ont subi une réduction nette de leur population au cours de la même période. Il devenait, en effet, de plus en plus difficile de survivre grâce à l’agriculture traditionnelle, le développement interne ne permettant pas de créer d’autres emplois sur place. Les gens ont donc fui vers les côtes et les villes plus importantes, où le chômage est aujourd’hui massif.

Une photographie nocturne prise par satellite de la péninsule ibérique révèle la même chose : une bande lumineuse le long de la côte méditerranéenne, des concentrations brillantes à Madrid et à Lisbonne et une obscurité générale à l’intérieur.

Une carte des précipitations annuelles révèle le même problème, puisque environ la moitié du pays – en particulier la zone centrale des plateaux – est semi-aride (moins de 500 mm de précipitations par an). Le manque de projets d’ampleur pour apporter de l’eau (accompagnée du développement de la population) dans cette région est un trait caractéristique du manque historique de développement de ce pays.

Une carte des voies ferrées révèle un contraste intéressant. L’Espagne possède environ 19.000 km de voies ferrées qui sillonnent le pays, dont 2600 km à grande vitesse. Cela fait d’elle le premier pays d’Europe en termes de kilométrage de lignes à grande vitesse, et le second dans le monde après la Chine.

...et sous-employée

L’économie espagnole est malheureusement tournée vers le tourisme et l’immobilier, avec 69 % de l’ensemble de l’emploi officiel dans le secteur dit des services (y compris 370 000 prostituées « légales »). Seuls 13 % travaillent dans l’industrie, 9 % dans la construction et dans les mines, 5 % dans les transports et 4 % dans l’agriculture.

En témoigne l’offre faite début avril 2012 par Sheldon Adelson, le plus important propriétaire de casinos au monde, notamment de Las Vegas Sands Corp., d’investir 35 milliards de dollars en Espagne dans la construction de 12 établissements, comptant chacun 3000 salles, pour attirer 11 millions de touristes par an, et créer ainsi 300.000 nouveaux emplois. Adelson est également connu comme le grand pourvoyeur de fonds de la candidature présidentielle ratée de Newt Gingrich aux États-Unis. Il est aussi un proche ami du Premier ministre israélien va-t-en-guerre Benjamin Netanyahu, et l’une des principales étoiles des cercles de l’argent sale et du crime organisé dominé par l’oligarchie financière anglo-américaine.

Le taux de chômage officiel en Espagne est de 24,4 % de la population active, et de plus de 50 % pour les jeunes de 16 à 24 ans, ce qui en fait le dernier pays d’Europe sur ce plan. Si l’on considère ce phénomène en termes régionaux, l’on voit que 3 des 17 régions autonomes ont des taux de chômage supérieurs à 30 % : l’Andalousie (33,2 %), les îles Canaries (32,3 %) et l’Estrémadure (32,1 %). Parmi elles, l’Andalousie est la région la plus peuplée du pays, avec près de 8,3 millions d’habitants.

Mais pour aussi mauvais que soit le chômage officiel, il n’est rien comparé au chômage réel, calculé du point de vue de l’économie physique telle que la définit Lyndon LaRouche [1].

Parmi la population de 46,2 millions d’habitants, environ 30,7 millions sont en âge de travailler (de 16 à 64 ans). Parmi eux, seuls 23,1 millions sont considérés comme faisant partie de la Population économiquement active (PEEA), c’est-à-dire la force de travail. Bien que 18,1 millions soient considérés comme employés (contre 20,2 millions il y a 4 ans) et 5 millions comme inemployés (en hausse de 2,6 millions), le fait est que la moitié des « employés » sont improductifs, travaillant dans des domaines comme le tourisme, les finances, le commerce de détail, l’administration, etc. (ces calculs ont été réalisés grâce aux statistiques officielles de l’emploi par secteur, telles qu’elles sont présentées par l’INE, l’Institut national des statistiques.)

De ce point de vue, le taux de chômage réel en Espagne est aujourd’hui probablement de l’ordre de 60 %. Bien qu’une petite partie de la catégorie des emplois improductifs soit raisonnablement socialement nécessaire, et par conséquent devrait entrer dans la catégorie de l’emploi réel, ce facteur est probablement largement compensé par le chômage déguisé des 16-64 ans ne figurant pas formellement dans la force de travail (PEEA) – c’est-à-dire ceux qui sont tellement démoralisés qu’ils ont abandonné toute recherche d’emploi, etc.

Avec cette même approche pour la catégorie des jeunes (16 à 24 ans), l’on trouve que les jeunes de la PEEA sont passés de 2,4 millions en 2008 à 1,9 million aujourd’hui, soit une chute de 21 %. Cela démontre l’existence d’un énorme chômage déguisé chez les jeunes, qui ont tout simplement été rejetés de la force de travail. Le chômage « officiel » chez eux est passé de 1,8 million à 1 million aujourd’hui (soit une baisse de 44 %), tandis que l’emploi productif est passé de 836 000 à 390 000 (une baisse de 55 %). Le pays est littéralement en train de dévorer sa jeunesse, son propre avenir, sous le modèle actuel de l’UE.

Avec une force de travail (PEEA) de 23,1 millions, dans laquelle seuls 9 millions travaillent réellement dans la production, l’Espagne a un besoin urgent de créer jusqu’à 14 millions de nouveaux emplois productifs dans les hautes technologies, dont au moins 2 millions pour les jeunes.

La fuite des cerveaux qui a lieu aujourd’hui en Espagne et au Portugal doit être arrêtée et inversée. Les politiques actuelles de la Troïka encouragent activement les jeunes portugais et espagnols, la ressource la plus importante de ces pays, à émigrer pour survivre. En ce qui concerne le Portugal, qui vit l’une des plus fortes vagues d’émigrations de son histoire, les citoyens partant chercher à l’étranger les emplois qu’ils ne trouvent pas chez eux, le Premier ministre Pedro Passos Coelho a suggéré en décembre 2011 que les professeurs au chômage cessent de « se plaindre » et prennent l’initiative d’émigrer en Angola, au Mozambique ou au Brésil, des pays lusophones.
Le Portugal possède l’un des plus faibles niveaux scolaires d’Europe, avec une moyenne de seulement 7,7 années passées à l’école chez les moins de 25 ans, ce qui n’empêche pas le gouvernement de dire : « les professeurs portugais peuvent chercher dans l’ensemble du marché lusophone et trouver une alternative  ».

Cette déclaration a déclenché une vague de protestations dans le pays, sous le slogan : « M. le Premier ministre : vous émigrez ! »

Les politiques du Premier ministre espagnol Mariano Rajoy ne sont pas différentes – et sont aussi dictées par l’UE et le FMI. Son gouvernement a annoncé une réduction de 22 % des dépenses allouées à l’éducation, de pair avec 37 % de réductions dans les budgets des maternités et des écoles primaires. Les jeunes espagnols quittent massivement le pays après avoir terminé leur cursus scolaire. Dans une Lettre ouverte publiée à la mi-mars 2012, les scientifiques ont mis en garde contre une « fuite des cerveaux » et un « effondrement » de la recherche en Espagne.

Arrêter cette fuite des cerveaux suicidaire implique un plan de reconstruction centré sur le rôle que pourront jouer l’Espagne et le Portugal au sein du Pont terrestre mondial, notamment comme l’un des principaux ponts de l’Europe vers l’Afrique. L’Espagne doit être mise au travail pour rebâtir sa propre économie et pour fournir les infrastructures, l’ingénierie et les biens d’équipement nécessaires au développement de l’Afrique.

De grands projets hydrauliques

Les précipitations en Espagne produisent environ 112 km³ d’eau par an, ce qui revient annuellement à environ 2700 m³ par habitant. A comparer avec une moyenne de 10.600 m³ pour l’ensemble de l’Europe. De ce total disponible, la quantité réellement utilisée (retenue d’eau) est de 875 m³ par habitant et par an, ce qui est tout à fait comparable avec le reste de l’Europe. Mais là encore, la moyenne élude le fait que les plateaux du centre et la côte Méditerranée sont désespérément privées d’eau. En conséquence, une surexploitation problématique des aquifères a lieu dans ces régions plus arides.

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Les précipitations moyennes sur l’ensemble de l’Espagne sont de 650 mm, mais la plupart des plateaux du centre du pays et de la côte Méditerranéenne ne bénéficient que de moins de 500 mm, le plus souvent moins de 300 mm (carte 2). La province d’Almería en Andalousie est probablement la région la plus aride d’Europe ; sa région du Cabo de Gata reçoit à peine 125 à 150 mm de pluie par an. (Les zones arides ou désertiques sont classifiées selon les conventions comme recevant entre 0 et 250 mm de précipitations par an ; 250 à 500 mm pour les zones semi-arides.)

L’Espagne a bâti un nombre important de barrages (leur nombre est passé de 60 au début du XXe siècle à environ un millier aujourd’hui) ; elle dispose des réservoirs capables de retenir environ 54 km³ d’eau – soit presque la moitié de l’écoulement annuel, la proportion la plus élevée d’Europe. Environ 80 % de l’ensemble de l’eau retenue est utilisée dans l’agriculture, en particulier dans le Sud-est qui est plus productif. Près de 20 % des terres agricoles sont irriguées et l’on estime qu’elles produisent environ la moitié de la production alimentaire du pays.

En juin 2001, le gouvernement espagnol a proposé de mettre en place un Plan hydrologique national (PHN) très modeste, qui aurait transféré environ 1 km³ d’eau par an depuis l’Èbre dans le Nord-est du pays, vers la côte Méditerranée, appuyé par une demi-douzaine de centrales de dessalement. Mais le projet a été arrêté par le World Wildlife Fund (WWF) et ses alliés verts dans le pays.

L’Èbre possède le plus haut débit de tous les fleuves espagnols, son débit moyen enregistré à la station limnométrique de Tortosa, située à 48 km de l’embouchure du fleuve, était de 13,8 km³ par an de 1960 à 1993 (équivalent à un flux moyen de 425 m³/s). Cependant, ce débit est très irrégulier au cours de l’année ; de plus, il a diminué au fil des ans, en raison de l’augmentation des retenues d’eau en amont : entre 2000 et 2008, il était en moyenne à Tortosa de 8,8 km³ par an.

Depuis les années 1930, 138 réservoirs ont été construits dans le bassin de l’Èbre, avec une capacité de stockage de 6,8 km³ – plus de la moitié du débit annuel moyen entre 1960 et 1990. L’idée du PHN (voir carte 2) était de transférer 1,05 km³ par an, soit environ 12 % de l’actuel débit annuel de l’Èbre qui s’élève à 8,253 km³. De cette quantité totale, 0,19 km³ devait être transféré au Nord vers Barcelone ; 0,315 km³ au Sud vers Valence ; 0,45 km³ au Sud vers Murcia ; et 0,095 km³ au Sud vers Almería. Environ 120 nouveaux barrages devaient être construits, ainsi que des canaux et 10 stations de pompage. Hormis la portion alimentant la zone urbaine de Barcelone, le reste du transfert était principalement destiné à l’agriculture.
Selon les critères internationaux, le projet de l’Èbre, avec son transfert d’1 km³ par an, est très modeste. A des fins de comparaison, le projet NAWAPA (L’Alliance Nord-Américaine pour l’Eau et l’Énergie) transférerait 165 km³ d’eau par an ; et même le modeste PLHINO (plan hydraulique du Nord-est du Mexique) transférerait annuellement 7 km³.

Mais, dès 2004, le gouvernement espagnol de José Luis Rodríguez Zapatero a suspendu le PHN et lui a substitué un programme plus modeste de production d’eau douce sur la côte Méditerranéenne au moyen d’usines de dessalement (0,715 km³/an) – un projet qui, comme l’on pouvait s’y attendre, n’a jamais vu le jour. Le principal responsable du sabotage du projet de l’Èbre est le WWF, qui est explicitement opposé à tout transfert d’eau d’un bassin à un autre, où que ce soit dans le monde.

Le WWF a publié en 2004 un rapport classant l’Espagne parmi les trois plus mauvais pays d’Europe en termes de gestion de l’eau, et dans une dépêche de presse intitulée « Sept raisons d’arrêter le Plan hydrologique national espagnol », il dénonçait le PHN comme « illégal selon la législation de l’UE », « économiquement injustifié » et – bien sûr – « destructeur sur le plan environnemental ». Cela a mené à une enquête du Parlement européen, qui a assimilé le plan à « la gestion de l’eau à la soviétique » et a demandé au gouvernement espagnol de répondre aux accusations du WWF. Résultat : le plan fut suspendu.

En vertu du Plan Marshall pour le bassin méditerranéen, l’Espagne relancera immédiatement le projet du Plan hydrologique national pour le transfert d’eau depuis l’Èbre, ce qui impliquera de renvoyer du pays le WWF et son influence. Cela engendrera de nombreux bénéfices collatéraux, comme la fin de la pollution mentale verte infligée à la jeunesse, ainsi qu’éventuellement la fin de la monarchie espagnole – après tout, le roi Juan Carlos est aussi président d’honneur du WWF-Espagne.

Cependant, le projet de l’Èbre en lui-même est insuffisant pour régler sérieusement la pénurie d’eau dans la plus grande partie du pays. Un projet ambitieux de dessalement par le nucléaire devrait être initié, par lequel l’eau potable sera littéralement fabriquée.

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La source énergétique la plus efficace pour alimenter des usines de dessalement est l’énergie nucléaire. L’un des types de réacteurs les plus intéressants est le réacteur modulaire à haute température refroidi au gaz (HTGR), capable de produire 350 mégawatts. Une « île » de quatre réacteurs modulaires HTGR peut ainsi produire une puissance de 1400 mégawatts. Ce niveau de puissance, transmis à une unité de dessalement par distillation flash multi-étages, générera environ 145 millions de mètres cubes d’eau potable par an, et produira en plus 446 MW d’électricité.

Si l’Espagne commençait à construire 10 îles nucléaires de ce type, principalement le long de la côte Méditerranée, chacune accolée à des unités de dessalement d’eau, elle générerait annuellement environ 1,5 km³ d’eau potable – 50 % de plus que le projet de l’Èbre. Cela créera des conditions où l’agriculture de haute technologie pourra vraiment prendre pied dans le pays, en plus des nombreuses industries que cela implique en aval.
De cette manière, le pays deviendra un exportateur net sur le plan alimentaire, non seulement vers l’Europe mais aussi vers l’Afrique.

A toute vitesse vers le nucléaire

L’Espagne ne se développera jamais, à moins qu’elle ne se débarrasse de l’idéologie verte qui a pris corps dans tout le pays, en particulier chez les jeunes, et l’a transformé en leader mondial de la folle politique d’incitation au solaire et aux éoliennes.

Elle a pourtant connu un bon début dans le domaine de l’énergie nucléaire, en démarrant la construction de sa première centrale en 1964, devenue opérationnelle en 1968. Au cours des années 1970 et 1980, huit réacteurs nucléaires ont été mis en service. Mais, en 1983, un moratoire sur la construction des centrales nucléaires est adopté par le gouvernement (dirigé par Londres) du Premier ministre Felipe González (1982-1996), qui a réaffirmé le moratoire en 1994 et a abandonné cinq unités en cours de construction.

Aujourd’hui, le pays dispose de huit vieilles centrales nucléaires qui, en 2010, fournissaient 21 % de la production nationale d’électricité. Le gaz naturel produisait 32 % ; le charbon 9 % ; 15 % provenaient étonnamment des éoliennes, et 5 % des solaires et autres énergies renouvelables (voir figure 2). En d’autres termes, l’éolien et le solaire – avec leurs densités de flux énergétique faibles et destructrices – produisent aujourd’hui autant d’électricité que le nucléaire ! Ces dernières années, d’énormes subventions financières pour l’éolien et le solaire ont mené à une hausse spectaculaire de la capacité de production de ces secteurs. Mais en 2010 le gouvernement est revenu sur les taux de subventions en faveur du solaire, l’austérité budgétaire ayant pris la tête de l’ordre du jour.

Alors que la consommation électrique totale de l’Espagne avait constamment augmenté jusqu’en 2008, elle a depuis lors chuté jusqu’au niveau actuel d’environ 5600 kWh/an par habitant. La consommation énergétique totale a aussi connu un pic en 2007, et a depuis lors chuté de 15 % par habitant. En termes d’autosuffisance énergétique, l’Espagne est extrêmement dépendante de ses importations en pétrole et en gaz : le pétrole représente 47 % de la consommation énergétique totale ; le gaz naturel 23 %. L’énergie nucléaire représente 12 % de l’énergie totale consommée et est produite à 100 % en Espagne. En fin de compte, l’Espagne ne produit que le quart de l’énergie qu’elle consomme.

Selon notre plan, l’énergie nucléaire se substituera aux renouvelables qui ne produisent ni le volume énergétique ni les niveaux de densité de flux énergétique nécessaires à la société moderne. Même Don Quichotte, aussi confus qu’il soit, savait qu’il fallait se débarrasser des moulins à vent !
Actuellement, le nucléaire génère environ 7500 MWe par an, soit un cinquième de l’électricité produite. La proposition de construire les dix îles nucléaires nécessaires au dessalement est un bon début pour améliorer cette situation, en générant environ 14 000 MWe annuels, ce qui triplera quasiment le niveau actuel. De cela, 9500 MWe seront « alloués » au dessalement, et 4500 MWe seront disponibles en tant que production nette d’électricité. Une douzaine, ou plus, de centrales nucléaires de quatrième génération seront aussi construites à l’intérieur du pays, pour produire environ 20.000 MWe annuels.

Au Portugal, au moins trois îles nucléaires de ce type seront également construites le long de la côte Sud, pour dessaler de l’eau et produire de l’électricité.

Bâtir le pont vers l’Afrique...

L’un des atouts de l’économie physique espagnole est son secteur ferroviaire, à la fois en termes d’infrastructures existantes et de capacités d’ingénierie et de production sur le plan mondial. Des trains à grande vitesse circulent aujourd’hui sur 2600 km de ligne en Espagne, avec d’importantes lignes supplémentaires en construction. Le plan gouvernemental – qui ne pourra jamais être appliqué dans le carcan de l’euro – prévoit de construire 10.000 km de lignes à grande vitesse (LGV) dès 2020.

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Historiquement, l’Espagne utilise un écartement des rails différent (1668 mm) de l’Europe (1435 mm, aussi appelé « écartement standard UIC »), ce qui a créé d’importants goulets d’étranglement nécessitant – jusqu’à relativement récemment encore – le transfert des passagers et du fret à la frontière française. L’écartement légèrement plus large du Portugal (1674 mm) est interopérable avec celui de l’Espagne. On fait donc souvent référence aux deux sous le nom d’ « écartement ibérique ».

La raison d’être du Pont terrestre mondial exige une solution à ce problème. Les nouvelles lignes peuvent et devraient être standardisées, mais des solutions temporaires pour relier les réseaux ferroviaires existants ayant des écartements différents sont aussi nécessaires. Il existe désormais une technologie, inventée par les entreprises espagnoles, pour changer automatiquement l’écartement des essieux existants alors que les wagons roulent (à environ 15 km/h). Cela requiert des essieux spécialement conçus à cette fin.

La compagnie espagnole Talgo a innové en 1969 en développant la première application commerciale d’essieux d’écartement variable. Une seconde entreprise espagnole, CAF, a développé son propre système en 2003. D’autres pays produisent désormais des systèmes similaires comme la Pologne (SUW 2000, en 2000), le Japon (en 2007) et l’Allemagne (Rafia, sans déjà disposer d’application commerciale).

En 1988, l’Espagne a décidé de construire toutes ses LGV selon l’écartement européen (UIC). Il existe aujourd’hui quatre LGV principales : Madrid-Barcelone, Madrid-Valence, Madrid-Valladolid, et Madrid Séville/Málaga.
De nombreuses compagnies espagnoles sont aujourd’hui impliquées dans les trains à grande vitesse, notamment Talgo, Renfe, CAF, AVE, etc. CAF a récemment signé des contrats pour la construction de cinq LGV en Turquie. Talgo, de son côté, a construit et dirige les travaux de construction de lignes au Kazakhstan, en Argentine, aux États-Unis, ainsi que le corridor européen Portugal-Espagne-France-Suisse-Italie. Ils viennent aussi de vendre 17 wagons et une locomotive aux Chemins de fer russes, qui pourront désormais rouler sans interruption entre Moscou (écartement standard) et Berlin (écartement UIC). Des lignes à grande vitesse existent aussi entre Berlin, Paris et Perpignan, d’où il sera possible de franchir les Pyrénées par un nouveau tunnel, jusqu’à Figueras, Barcelone et Madrid côté espagnol.
Le succès du nouveau Plan Marshall pour le bassin méditerranéen dépendra de la capacité de l’Espagne à utiliser ses atouts, en assumant un rôle central dans la conception, la construction et l’exportation de systèmes ferroviaires à grande vitesse. Elle développera simultanément des industries, par effet d’entraînement, notamment dans la construction, la sidérurgie, la métallurgie, les composants électriques et électroniques, les télécommunications, etc., tout en réalisant un bond dans le domaine des technologies à lévitation magnétique (maglev). Les nouveaux emplois productifs hautement qualifiés ainsi créés permettront une entaille importante dans le problème du chômage.

Les actuelles liaisons ferroviaires reliant l’Espagne et le Portugal au reste de l’Europe devront être améliorées et élargie. En plus du corridor Barcelone-Madrid (qui est déjà en service), il faudra :

une branche Atlantique : Madrid-Valladolid (déjà en service)-Burgos-Vitoria-Bilbao/Saint-Sébastien-Dax-Bordeaux-Tours (Paris).

une branche Ibérique : Madrid-Lisbonne-Porto.

De même, le Projet prioritaire n°16 de la Commission européenne, un axe ferroviaire de fret Sines/Algésiras-Madrid-Paris, relierait les terminaux de conteneurs de Sines (Sud-ouest du Portugal) et Algésiras (Sud de l’Espagne) au centre de l’Europe. Cela requiert la construction d’un corridor ferroviaire à grande vitesse pour le fret, y compris une nouvelle liaison de grande capacité au travers des Pyrénées, ce qui impliquerait un très long tunnel. Bien que cela soit techniquement viable, ces projets de l’UE sont financièrement et politiquement gelés, et ne verront jamais le jour sous le diktat actuel de Maastricht.

Quant au Portugal, l’accord avec l’Espagne pour bâtir une LGV de Madrid à Lisbonne a été suspendu en 2011 par le gouvernement de Passos Coelho, suivant ainsi les ordres de la Troïka. Non seulement cette ligne devrait être construite, mais les plans espagnols existant pour relier les deux pays par quatre lignes à grande vitesse (Vigo-Porto ; Salamanca-Porto ; Madrid-Badajoz-Lisbonne ; Séville-Huelva-Faro) devraient être lancés, ainsi que les LGV internes au Portugal entre Lisbonne et Porto et Lisbonne et Faro.

Le point le plus au Sud de ce réseau en Espagne est Algésiras. De là, une nouvelle ligne à grande vitesse sera construite jusque Tarifa et Cadix, puisque Tarifa sera le terminus espagnol d’un tunnel ferroviaire à grande vitesse passant sous le détroit de Gibraltar et débouchant à Tanger, au Maroc, et de là, reliera l’ensemble du projet africain au Pont terrestre mondial.

L’idée d’un tunnel avait d’abord été proposée en Espagne en 1930, et depuis cette époque, diverses options furent envisagées, y compris un pont fixe (rejeté en raison de l’impossibilité de construire les piliers de soutien à 300 mètres de profondeur), un pont flottant (abandonné en raison des forts courants océaniques du détroit), et un tunnel passant dans le fond marin (jugé non viable, à la fois à cause des forts courants et de l’instabilité du fond marin dans cette région).

En 2003, l’Espagne et le Maroc ont passé un accord pour étudier la possibilité de construire un tunnel fixe, et en 2006, leurs compagnies publiques SECEGSA (Espagne) et SNED (Maroc) ont demandé à la compagnie suisse d’ingénierie tunnelière de renom, Lombardi, de concevoir les plans du projet. En 2009, la proposition de Lombardi fut présentée à l’UE – après quoi absolument rien n’a été fait, parce que toute la zone euro et le système financier mondial s’effondrent.

L’itinéraire retenu envisageait l’option d’un tunnel partant de Tarifa, en Espagne, pour arriver à Tanger, au Maroc, là où le fond marin n’est « qu’à » 300 m de profondeur – ce qui en ferait le tunnel sous-marin le plus profond du monde. Sa longueur serait d’environ 40 km (carte 5) et il consisterait en deux tubes de lignes ferroviaires à la fois pour le transport de passagers et de fret, avec un tunnel d’urgence ou de service entre les deux.

Lombardi a évalué à environ 15 ans le délai de construction, étant donnés les problèmes à résoudre en ingénierie – y compris le fait que cette zone connait une forte activité sismique — et les difficultés liées à la stratification du fond marin, décrit comme une sorte de « cocktail de sable, de pierres et de boue, cauchemar des excavateurs ». En fait, les ingénieurs ont dû inventer de nouvelles méthodes de forage rien que pour percer des trous d’exploration, étant donné la formation des roches et les féroces courants sous-marins.

A des fins de comparaison, le tunnel sous la Manche n’est qu’à 50 m sous le niveau de la mer, et fait 49 km de long. Le tunnel sous le détroit de Béring serait à peu près à la même profondeur (54 m) et parcourrait 85 km au total, mais il recourrait aux îles de la Petite et de la Grande Diomède comme des « pierres de gué », réduisant ainsi le plus grand écart à seulement 35 km de long.

Une fois achevé, et relié à des LGV, SECEGSA et SNED calculent qu’il faudrait alors 1h30 pour se rendre de Casablanca au terminus du tunnel à Tanger ; 30 minutes pour traverser jusqu’à Tarifa, en Espagne ; moins de 3h30 pour aller ensuite jusqu’à Madrid ; et enfin 2h30 supplémentaires pour arriver à Barcelone. En d’autres termes, il faudrait moins de 8 heures pour aller de Casablanca à Barcelone ! Le site internet conjoint de SECEGSA/SNED résume leur concept du projet de la manière suivante : «  La liaison fixe par le détroit de Gibraltar peut être considérée comme la connexion décisive entre deux continents et deux grandes mers, qui articuleront un système de transport jusque-là inexistant entre l’Europe et l’Afrique et les alentours méditerranéens.  »

Il serait approprié, à l’occasion de ce projet, de rendre l’île de Gibraltar à l’Espagne, les Britanniques l’ayant accaparé au XVIIIe siècle.
Du côté marocain, le tunnel du détroit de Gibraltar sera relié aux LGV d’Afrique du Nord. Les Français aident déjà à construire des LGV au Maroc, et l’ensemble du projet ferroviaire Nord-africain est un domaine parfait pour la coopération franco-espagnole.

... et vers d’autres planètes

Cependant, la réalisation de ces ambitieux projets sur notre planète nécessite de communiquer aux futures jeunes générations un véritable enthousiasme pour la vraie mission de l’humanité : l’impératif extraterrestre. Les nouvelles percées scientifiques – et l’optimisme culturel qui en est le corollaire – si rares de nos jours, n’apparaîtront qu’avec un tel objectif et une telle mission. Avec cela à l’esprit, notre Plan Marshall pour le bassin méditerranéen construira aussi une base spatiale euro-africaine, l’une des plus importantes au monde, ainsi qu’une ville scientifique qui lui sera associée, sur les îles Canaries. Ce site – à 100 km au large de la côte Ouest du Maroc, sous la même latitude que la base américaine de Cap Canaveral – est idéal pour ce projet.

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En fait, il existe déjà un travail scientifique avancé aux Canaries. Les îles accueillant plusieurs observatoires, le plus récent et le plus important étant le télescope solaire GREGOR, inauguré le 21 mai 2012 à Ténérife. Ce télescope, le plus grand d’Europe, est situé sur le plateau au pied du volcan du Teide, et il est dirigé par un consortium de chercheurs de l’Institut Kiepenheuer de physique solaire, l’Institut d’astrophysique de Potsdam, l’Institut d’astrophysique de Göttingen, l’Institut Max Planck de recherche sur le système solaire et d’autres partenaires internationaux.

Les scientifiques de GREGOR n’observeront pas directement le Soleil. Ils auront recours à des détecteurs électroniques, comme des spectrographes, des polarimètres, des interféromètres et des caméras. Le miroir parabolique dévie vers les divers instruments les rayons générés en paquet par le système d’optique adaptive. Le but est de mesurer différents paramètres solaires physiques avec un niveau de précision inégalé, en particulier le champ magnétique du Soleil, et grâce à cela, de révéler de petites structures, jusqu’à une échelle de 70 km à sa surface – soit une capacité de résolution impressionnante, étant donné que le Soleil est situé approximativement à 150 millions de kilomètres de la Terre.

Ténérife, qui accueille déjà plusieurs observatoires astronomiques, deviendra le site d’une ville spatiale, qui sera reliée à l’aéroport par un train Maglev. Une étude de faisabilité pour une ligne Maglev reliant le Sud et le Nord de l’île a déjà été réalisée par l’Institut allemand de recherche ferroviaire de Berlin.

L’île de Lanzarote, qui offre un paysage dominé par la lave ressemblant de façon frappante aux surfaces de la Lune et de Mars, pourrait servir de site laboratoire pour les missions spatiales euro-africaines futures – le véritable destin de l’humanité !


[1Lyndon H. LaRouche, Alors, vous voulez tout savoir sur l’économie physique ? Éditions Alcuin, juin 1998