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Uber, une machine de guerre contre le droit du travail
15 février 2016
Karel Vereycken Solidarité&Progrès—UBERISATION. Verbe conçu d’après le nom de la société Uber. Selon l’Obervatoire de l’uberisation, qui propose de l’accompagner, il s’agit d’un « changement rapide des rapports de force grâce au numérique. (...) Au carrefour de l’économie du partage, de l’innovation numérique, de la recherche de compétitivité et de la volonté d’indépendance des Français, ce phénomène est une lame de fond qui va petit à petit impacter tous les secteurs de l’économie traditionnelle des services. »
Comme le montre cet extrait, la révolution numérique est en marche. Grâce à elle, des professionnels jusqu’ici incontournables, se font court-circuiter par des start-ups qui, grâce à une précarisation de la main d’œuvre et quelques gadgets électroniques, arrivent à offrir des services souvent de moindre qualité mais à des prix tellement plus alléchants. Que faut-il en penser ? La logique UberPop Le 11 février s’est ouvert à Paris le procès contre les patrons de la société Uber France pour son application UberPop de mise en contact d’utilisateurs avec des conducteurs. Sous les apparences de covoiturage, elle permettait l’exercice illégal de la profession de taxi. Déclarée illégale, Uberpop a été suspendue en juillet 2015. Selon l’entreprise, « UberPOP a été une source de revenus importante pour plus de 10000 conducteurs ». Uber a évoqué la possibilité d’en reconvertir certains en chauffeurs VTC. Cela nécessite une formation de 250 heures, une licence délivrée par les autorités et une voiture répondant à des normes strictes d’âge et de taille. En attendant, Uber, au niveau mondial, continue à sévir dans 377 villes du monde. Et d’autres sociétés du même type champignonnent. Uberpop incarnait à merveille la quintessence de la logique Uber qui n’a pas de salariés, mais paye ses travailleurs à la tâche. Et qui dit zéro salaire, dit zéro cotisation sociale. D’où (à certains moments) des prix hors de toute concurrence ! En pratique, les tarifs sont déterminés par un algorithme qui varie en fonction de la demande de transport ! A Sydney, lors d’une prise d’otages, Uber n’a pas hésité à multiplier ses tarifs par quatre en moyenne pour les personnes désirant fuir la zone… Et lors du réveillon de la Saint-Sylvestre, les tarifs pour traverser Paris, ont été déplafonnés pour atteindre les 200 euros… Uber, qui emploie 70 personnes en France ne fait que du relationnel et fournit des logiciels. Pourtant, elle prend une marge de 20 % sur la valeur produite tout en exploitant des milliers de personnes non salariés précarisées (maintenant avec le statut « d’indépendant »), bien contents de grappiller quelques euros pour boucler leurs fins de mois. Plusieurs milliers de Français ont conduit, sans la moindre formation et avec leur propre véhicule, le weekend et la moitié du temps, la nuit. La société Uber a été fondée à San Francisco en 2009 par Garrett Camp, Travis Kalanuck et Oscar Salazar sous le nom de UberCab (« SuperTaxi »). Rapidement, elle a eu le soutien de financiers de Wall Street, de Goldman Sachs et de Google, à ce jour le plus grand actionnaire et qui siège au Conseil d’administration. Machine de guerre La première chose à souligner c’est qu’Uber n’est pas une simple entreprise, mais une forme radicale de guerre politique et idéologique au profit de ce qu’on a le droit de qualifier d’oligopole bancaire anglo-hollandais. Au lieu d’acheter des hommes politiques, cet oligopole se sert des jeunes entrepreneurs pour imposer des changements politiques. Comme nous allons le voir, Uber est anglo-hollandaise dans la mesure où les Pays-Bas et les paradis fiscaux britanniques lui sont essentiels.
L’actionnariat des filiales d’Uber : Uber France SAS Uber International Holdings BV Uber BV Uber International BV Uber International CV Source : comptes des sociétés, disponibles sur le site de BFM-TV
Désobéissance civile
Uber se fiche éperdument des lois, des amendes, des procès, des travailleurs et des États. Ça fait plutôt rire. Travis Kalanick, le PDG américain d’Uber, estime que « la désobéissance civile est nécessaire pour défendre les bonnes causes ». Sa mission ? Imposer dans le monde entier son modèle féodal d’emploi sans droit et du « tous indépendants », c’est-à-dire la fin du droit du travail et des Etats-nations modernes. Ses appuis sont multiples et mondiaux. Et parmi ses conseillers, on peut compter David Plouffe, l’ancien directeur de campagne de Barack Obama, et en France, Emmanuel Macron, l’ancien protégé de Jacques Attali. Initié aux secrets des dieux du temple financier, pour ce dernier :
Enfin, soulignons qu’Uber, qui ne produit aucune richesse réelle, n’est qu’une vaste bulle financière et qu’elle éclatera sans doute d’ici peu. Car, s’il y a cinq ans, il s’agissait d’une simple application de téléphonie mobile imaginée par deux Californiens lors d’une nuit de beuverie parisienne, aujourd’hui Uber, avec seulement quelques centaines d’employés, est supposé « peser » 40 milliards d’euros, c’est-à-dire autant que le groupe EADS-Airbus ! Êtes-vous prêt à vous faire uberiser ? S’il s’agit pour l’instant des chauffeurs de taxis, demain ce sera le tour aux professeurs, aux pompiers, aux médecins, aux avocats, aux restaurateurs et aux infirmières. Uber, évidemment n’est que la caricature d’un monde qui s’imposera à nous lorsque nous laissons les nouvelles technologies, dans ce cas-ci le numérique, aux mains de requins de Wall Street et la City. Je crois savoir qu’un certain Jacques Cheminade vous avait mis en garde, non ? Pour S&P :
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