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La seule option est le Glass-Steagall

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La seule option est le Glass Steagall

par Gilles Gervais

17 mai 2010

Depuis l’annonce le 9 mai d’un plan de sauvetage des banques de la zone euro par les gouvernements européens, c’est désormais la planète entière qui risque l’hyperinflation monétaire comme ce fut le cas pour l’Allemagne de Weimar à l’automne de 1923. (1)

Certains patriotes aux États-Unis, dont l’économie est plus que chancelante et dont la Réserve Fédérale est impliquée dans le plan de sauvetage de l’Europe, ont décidé d’agir pour se protéger contre cette politique insensée en érigeant un pare-feu entre activités bancaires légitimes et spéculation.

C’est ce que le sénateur John McCain (R-AZ) et la sénatrice Maria Cantwell (D-WA) (2) ont proposé en introduisant un amendement au projet de loi de réforme financière du sénateur Chris Dodd (D-CT), pour remettre en vigueur aux États-Unis les critères de la loi « Glass-Steagall » (3) promulguée par le Congrès américain, en 1933, au tout début du premier terme de l’administration de Franklin Delano Roosevelt. Cette loi avait été abrogée en 1999, par l’entremise du secrétaire au Trésor de l’époque, Larry Summers.

Les forces liées à la spéculation financière ne chôment pas. Le Président Obama menace de mettre son veto à l’amendement Cantwell-McCain et Chris Dodd, le président de la commission des Finances, travaille avec Harry Reid (D-NE), le leader de la majorité démocrate au Sénat, pour empêcher qu’un vote ait lieu sur Glass-Steagall.

Face à cela, une campagne en faveur de Glass-Steagall se poursuit actuellement auprès des Sénateurs (appels, e-mails, visites, etc.) afin que cette législation d’inspiration rooseveltienne puisse, encore aujourd’hui, sauver l’Amérique du gouffre financier. Les patriotes au sein des deux partis, qui appuient la loi Glass-Steagall, menacent d’entreprendre un filibuster si les leaders du Sénat tentent d’empêcher un vote sur cet amendement.

L’économiste américain Lyndon LaRouche, qui combat depuis des décennies pour un retour aux fondamentaux rooseveltiens, a déclaré le 8 mai depuis Washington, lors d’une conférence internet, que la bataille au Congrès américain autour de la loi Glass-Steagall décidera du sort des États-Unis et du système financier international.

Nous rendons disponibles, ici, quelques extraits du discours que Larouche a alors prononcé. L’ensemble du discours de LaRouche et la période de questions et réponses, ainsi que le dialogue qu’il a eu avec des institutionnels américains, sont disponibles sur vidéo avec traduction française. (4)

Lyndon LaRouche :

[Il s’agit d’extraits mis bout à bout dans l’ordre chronologique du discours]

« Ce qui a déclenché cette affaire n’est pas strictement interne aux États-Unis. Le fait est que l’Empire britannique, c’est à dire le système financier international mené par le cartel bancaire Inter-Alpha, est au bord de l’effondrement.

« La première victime de cette désintégration est l’euro. La monnaie unique européenne est un instrument mis en place dès 1989 par le système britannique. Il en est partie intégrante, tout comme l’Inter-Alpha Group et les pirates des Caraïbes – ses extensions dans les places financières offshore.

« Le renflouement de la Grèce est une escroquerie visant à briser les nations européennes. On l’a vu avec le retour de flamme depuis son adoption la semaine dernière, y compris avec ce qui s’est passé jeudi à Wall Street. La Grèce n’aurait pas dû être renflouée. Elle aurait dû procéder souverainement à une réorganisation financière. Pousser tous les pays européens à la renflouer n’a qu’un but : ruiner d’un seul coup toute l’Europe. Ces pays subissent maintenant un retour de flamme qui s’est propagé jusqu’à Wall Street. Si bien que, puisque Wall Street n’est qu’une extension de cet empire financier mondial, l’ensemble du système britannique est maintenant au bord de l’explosion.

« ... Mais il n’y a pas que des traîtres et des imbéciles aux États-Unis. C’est ce que l’on voit avec l’amendement Glass-Steagall promu par les sénateurs John McCain et Maria Cantwell. Avec quelques autres, ils ne comptent pas rester assis à contempler la destruction de leur pays. C’est pour cela qu’ils ont entrepris d’enrayer la réforme Dodd en y introduisant le Glass-Steagall. Ce groupe de gens déterminés sait que le système britannique est prêt à s’effondrer et que s’ils n’appliquent pas les remèdes appropriés pour défendre les États-Unis, nous plongerons aussi. Ils n’agissent donc pas en politiciens, mais en patriotes. Les intérêts de Wall Street qui soutiennent la politique d’Obama sont des traîtres car ils sont prêts à sacrifier les États-Unis. Eux, par contre, ils agissent en patriotes face à l’effondrement total du système monétaire et financier international. En adoptant le Glass-Steagall ici, nous nous donnerons les moyens de sortir l’Europe de leur situation difficile, en étendant les principes de cette loi au vieux continent.

« Tout ce que l’on considère être aujourd’hui des actifs financiers sont en réalité sans aucune valeur. Ce ne sont que des produits dérivés issus de jeux d’argent ; des paris sur des jeux de paris. Ils n’ont absolument aucun lien avec des actifs économiques réels. C’est une fraude de plusieurs centaines de milliers de milliards, voir même de millions de milliards de dollars. Cette dette financière mondiale ne vaut absolument rien ! Ces actifs équivalent au mieux à de vulgaires billets de Monopoly.

« Avec l’approche Glass-Steagall, nous pouvons éliminer l’ensemble de ces actifs et défendre l’intégrité des obligations légitimes qui se trouvent dans les banques normales. Ce type de réorganisation aurait dû être entrepris dès 2007, comme je l’avais prescrit, mais cet imbécile de Barney Franck l’a empêché. Résultat, la population américaine est frappée par la misère et bientôt par la faim. Nous sommes au bord d’un éclatement social. Alors qui allons-nous défendre ? La population ? Les emplois industriels ? Les collectivités locales ? Le pays ? Ou bien les intérêts financiers étrangers, ces monstres renfloués du système britannique ?

« Le système est désormais hors de contrôle et ce qui arrive était entièrement prévisible, étant donné la folie qui règne dans la finance et la politique.

« L’initiative McCain-Cantwell est une réponse à cette réalité. Nous assistons maintenant à un véritable éclatement et une réorganisation du système politique américain bipartite. Il ne s’agit plus de républicains contre des démocrates. Il y a désormais une faction patriotique composée de membres des deux camps et qui croît à vue d’œil. Cette opposition à Obama et au système britannique ne reste formellement qu’une minorité, mais avec le soutien du peuple tout change. La population voit enfin des dirigeants se lever pour rompre avec la folie ambiante et elle n’attendait que ça.

« Les États-Unis sont sur le point d’adopter à nouveau la loi Glass-Steagall. Les britanniques vont très mal le prendre car l’application du Glass-Steagall condamne leur système.

« Nous sommes en position de changer le cours des choses. Nous sommes dans l’un de ces moments de l’histoire où les facteurs objectifs – les forces en place et la peur des gens – qui déterminent habituellement les évènements, volent en éclat face à un phénomène que décrivait parfaitement Percy Shelley à la fin d’En Défense de la Poésie.

« Parfois les gens sont saisis par une force qu’ils ne comprennent pas toujours mais qui les pousse à l’action. Ainsi fut la Révolution américaine, où un peuple isolé, loin de l’Europe, en est arrivé à se rendre compte qu’il devait défendre ses acquis. Souvent dans l’histoire nous avons vécu de longues périodes de souffrances auxquelles ont soudainement succédées les forces du changement. C’est comme une lame de fond. Il suffit de quelques meneurs bien en phase et le peuple leur répondra. Si la plupart des gens ne comprennent pas pleinement ce phénomène, ils le perçoivent très bien. Ils sentent lorsqu’un piège se referme sur eux et savent que quelque chose doit être tenté.

« Aujourd’hui, la ligne de rupture, c’est le Glass-Steagall, et nous avons quasiment les moyens de le faire passer. Avec ce que j’ai dit aujourd’hui, qui sera entendu et discuté par les personnes concernées dans les institutions, nous pourrons avoir l’élan nécessaire. Malgré nos divergences, ces gens sont d’accord avec ce que je dis et nous avons en commun d’être des patriotes. C’est ce qui peut faire la différence. »

Un « Glass-Steagall » global

Y aura-t-il un nombre suffisant de patriotes pour se tenir debout au Sénat américain cette semaine ?

Nul ne saurait répondre.

La seule certitude est que « sans une réforme selon les critères de la loi Glass-Steagall éliminant les caractéristiques monétaristes des systèmes de Wall Street et de la City de Londres, les possibilités d’échapper à un nouvel âge des ténèbres planétaire sont pratiquement nulles ». (5)

La proposition selon laquelle il faudrait revenir au statu quo d’avant l’Euro, de rétablir les monnaies nationales, d’invalider le Traité de Maastricht, le Pacte de Stabilité et le Traité de Lisbonne, puis retourner à une Europe d’États-nations souverains est adéquate et nécessaire, mais elle exige aussi le passage de la loi Glass-Steagall, d’abord aux États-Unis et, par la suite, en Europe.

Cette première étape cruciale franchie, il devient alors possible d’amener les quatre puissances (6) que sont les États-Unis, la Russie, la Chine et l’Inde à coordonner leurs efforts afin d’initier un nouveau système de crédit international, à taux de change fixe et inspiré par l’approche d’Alexandre Hamilton, le premier secrétaire au Trésor américain.

Nous sommes actuellement confrontés à un véritable « punctum saliens », selon l’expression du grand poète républicain Friedrich Schiller.

C’est précisément lorsque surviennent de tels points d’inflexions dans le cours de l’histoire qu’il devient possible pour un individu de saisir ce moment inspiré de son existence pour agir, « à la fois comme patriote passionné de sa nation et comme citoyen du monde ». (7)

Dans de telles circonstances, le cours de l’histoire peut basculer en un seul jour. Ce jour est peut-être venu.

Notes :

(1) « “Pare-feu” - En Défense de l’État-nation ». Vidéo de 1h.24 min., sous-titrée en français. (www.comiterepubliquecanada.ca, Page d’accueil)

(2) « OK ! La Loi Glass-Steagall Introduite au Sénat américain ». (www.comiterepubliquecanada.ca, 7 mai 2010, « Nouvelles internationales »)

(3) « La Loi Glass-Segall : Comment FDR remit les banquiers à leur place ». (www.comiterepubliquecanada.ca, 8 octobre 2008, section « Vers un Nouveau Bretton Woods »)

(4) Webcast de Lyndon LaRouche du 8 mai, 2010 à Washington, D.C. Vidéo, avec traduction simultanée en français. (www.comiterepubliquecanada.ca, page d’accueil)

(5) « Un Glass-Steagall global », par Lyndon LaRouche, 8 février, 2010. Pour approfondir la pensée économique de LaRouche, voir « L’économie pour les scientifiques : la science économique en bref ».(www.comiterepubliquecanada.ca, section « Les écrits de Lyndon LaRouche »)

(6) « Mettre à l’ordre du jour le plan LaRouche pour sauver l’économie mondiale ». L’Appel de l’Institut Schiller du 1er novembre 2009. (www.comiterepubliquecanada.ca, section « Vers un Nouveau Bretton Woods »)

(7) Friedrich Schiller. Voir également la conférence de Benoit Chalifoux : « La Grève de Masse de Rosa Luxemburg et son actualité aujourd’hui ». (www.comiterepubliquecanada.ca, section « Nos Activités »)