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Suite à la décision de Trump, l’aventure spatiale commune redevient possible

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S&P—Le président américain a signé le 11 décembre une directive lançant une nouvelle politique spatiale, sous le nom de « Space Policy Directive 1 » (« directive sur la politique spatiale »), et dont l’objectif est le retour d’astronautes américains sur la Lune, étape fondamentale pour préparer les prochaines missions habitées vers Mars. Ce faisant, il ouvre potentiellement une nouvelle ère de l’exploration du système solaire, une ère de paix et de développement dont la coopération spatiale constituera à la fois le moteur et l’horizon.

« La directive que je signe aujourd’hui recentrera le programme spatial américain sur l’exploration et la découverte humaine », a déclaré Donald Trump. « Cela marque une étape importante du retour des astronautes américains sur la Lune pour la première fois depuis 1972, pour une exploration à long terme. Cette fois-ci, non seulement nous planterons notre drapeau et laisserons notre empreinte, mais nous poserons les bases d’une éventuelle mission sur Mars et peut-être, un jour, dans de nombreux autres mondes ».

« Cette directive fera en sorte que le programme spatial américain soit une fois de plus à l’avant-garde et inspirera toute l’humanité », a-t-il continué. « Nous lèverons les yeux jusqu’aux cieux. Imaginez les possibilités qui nous attendent dans ces belles étoiles, si nous osons rêver grand. C’est ce que notre pays fait à nouveau, nous rêvons grand ».

L’administrateur associé de la NASA, Robert Lightfoot, n’a pas caché son enthousiasme : « nous sommes assez excités  », a-t-il déclaré devant la Space Transportation Association, au Capitol. Une bonne partie des employés de la NASA ne sont en effet pas mécontents de voir prendre fin le programme exotique d’Obama, qui visait à envoyer des astronautes à la recherche de métaux rares sur un astéroïde y compris à une distance supérieure à celle de Mars. Lightfoot a également souligné la différence avec le programme Constellation de George W. Bush, où la Lune constituait un objectif en soi, tandis que le nouveau projet a pour horizon la planète Mars.

Répondant à une question à ce sujet, le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères Lu Kang a dit que la Chine souhaitait renforcer la coopération internationale dans ce domaine. « La Chine est heureuse de voir des pays réaliser des progrès dans l’exploration et l’utilisation de l’espace à des fins pacifiques », a-t-il déclaré. Cette ouverture affichée par les Chinois contraste avec l’idée que les médias tentent de répandre selon laquelle cette décision de Trump va déclencher une nouvelle « course à l’espace  » avec la Chine. Il s’agit là du point de vue des néoconservateurs anti-chinois, pas du point de vue des Chinois eux-mêmes.

De son côté, le cosmonaute vétéran Sergei Krikalev a rappelé que la coopération spatiale est fondamentale car elle montre la voie pour une coopération plus large. Dans un entretien avec Sputnik, il a expliqué que « dans l’espace, on dépend les uns des autres, de telle façon que la coopération se déroule en étant très peu affectée par les turbulences politiques. Et j’ai bon espoir que l’exemple que nous montrons dans l’espace pourra être suivi dans d’autres domaines [sur terre] ».

Objectifs communs de l’humanité

Suite à la diffusion du communiqué de S&P « Donald Trump nous montre la Lune, cessons de fixer le doigt », le magazine Marianne a réagi en publiant sur son site un article intitulé « Espace : Jacques Cheminade se vante d’avoir inspiré Donald Trump ». Tout en déposant au passage un petit commentaire sarcastique (figure de style obligatoire pour tout journaliste parisien digne de son nom) sur « le programme jugé peu réaliste  » de l’ancien candidat aux présidentielles, l’article rappelle les grandes lignes de son programme spatial, et renvoie vers une vidéo YouTube réalisée en fin de campagne, intitulée « Retour sur Terre ». Mais, comme l’a ensuite fait remarquer Jacques Cheminade sur Twitter, Marianne élude l’aspect fondamental de l’exploration spatiale : la notion d’objectifs communs de l’humanité : « Bien entendu, je ne me vante pas d’avoir inspiré Trump », a-t-il écrit. « Simplement : 1. L’exploration – bannissons le mot « conquête » – spatiale est une initiative qui porte les objectifs communs de l’humanité. 2. L’économie bleue et le développement de l’Afrique sont les deux autres enjeux de cette architecture politique. Certains ont le doigt long, d’autres voient plus loin  ».

Il est d’ailleurs singulier que l’on ait pratiquement oublié que cette notion d’exploration spatiale en tant qu’objectif commun de l’humanité était justement une idée qui animait John F. Kennedy, lorsqu’il avait lancé le programme Apollo. Sous l’effet du cinéma d’Hollywood, de la littérature de science-fiction, et de la propagande que les médias ont distillée à travers les dernières décennies, on a associé la « conquête » spatiale à une compétition – si ce n’est une guerre – dans les esprits des citoyens. Dès son discours d’inauguration, en janvier 1961, Kennedy avait pourtant appelé à ce « que les deux camps [États-Unis et Union Soviétique] étudient les problèmes qui nous unissent plutôt que d’aggraver ceux qui nous divisent. Que les deux camps cherchent à évoquer les merveilles de la science plutôt que ses abominations. Ensemble, découvrons les étoiles, conquérons le désert, éradiquons la maladie, explorons les profondeurs des océans et encourageons les arts et le commerce ». En septembre 1963, dans un contexte d’amorce de détente entre les États-Unis et l’URSS, il avait même proposé d’organiser une expédition soviéto-américaine vers la Lune.

Voici ce qu’écrivait Jacques Cheminade dans son projet présidentiel de 2017 : « par les défis immenses qui la caractérisent, cette mission lunaire exigera une coopération internationale la plus large possible et garantira, dans sa mise en œuvre, les percées scientifiques et technologiques essentielles aux étapes ultérieures de la grande aventure spatiale. (…) L’exploration spatiale est l’alternative au monde fini auquel nous soumet l’occupation financière et culturelle. Fil conducteur d’une coopération internationale pour le développement mutuel et la paix, elle est le stimulant le plus puissant de créativité et d’optimisme dans la recherche scientifique, l’éducation et la culture, et l’un des moteurs indispensables à l’agriculture, l’industrie et la médecine de demain. (…) Ignorer l’importance de l’espace, c’est se condamner à voir avec les yeux du passé. Je suis déterminé à voir avec les yeux du futur, pour que mon pays devienne un éclaireur des objectifs communs de l’humanité ». (extraits de la partie « l’espace, impératif économique et culturel »)